dimanche 22 avril 2007

Violence et fraudes affectent la présidentielle au Nigeria

BUJA (Reuters) - Le scrutin présidentiel organisé samedi au Nigeria, où l'on faisait état d'une participation médiocre, a été marqué par des violences et des accusations de fraude massive portées contre le parti au pouvoir.

L'élection constituait la première transition entre deux présidents civils dans le pays le plus peuplé du continent, qui a connu trois décennies de régime militaire.


Mais l'ampleur des fraudes et des manoeuvres dénoncées par l'opposition et par des observateurs indépendants ne laissent aucun espoir sur la réalité de l'avancée démocratique que le scrutin était censé représenter.

A Daura, dans le nord du pays, trois adolescents de onze à dix-sept ans ont été tués par l'armée lors d'une manifestation organisée par l'opposition.

Daura est la ville de natale de Muhammadu Buhari, ancien dirigeant militaire du pays (1983-85) et principal candidat de l'opposition. Il a annoncé à Reuters que de nouvelles manifestations étaient probables à partir de lundi si le Parti démocratique du peuple (PDP) au pouvoir proclame la victoire de son candidat, le discret gouverneur de l'Etat de Katsina, Umaru Yar'Adua.

"Il ne peut être question de victoire, parce que je ne pense pas qu'il y ait eu des élections", a-t-il ajouté en faisant allusion aux accusations de fraudes et de manipulation des urnes.

Des observateurs et des témoins ont signalé des fraudes étendues et l'absence dans des proportions massives de bulletins de vote. A 17h00 (16h00 GMT), alors que les bureaux de vote commençaient à fermer, Max van den Berg, observateur détaché par l'Union européenne, reconnaissait qu'il n'était pas certain que le scrutin comporterait quelque amélioration que ce soit après la "déception" des élections régionales du week-end précédent.

"Pour le moment, je suis inquiet", a-t-il dit à Reuters.

ENLÈVEMENT ET BOURRAGE D'URNES

D'autres formations ont accusé le Parti démocratique du peuple (PDP) de retirer des bulletins de locaux placés sous la supervision de la Commission électorale nationale indépendante (Inec) et de les manipuler illégalement.

"Ce qui s'est passé à travers le pays montre que le PDP, le gouvernement, l'Inec et certaines institutions chargées de faire respecter la loi ne sont pas prêtes pour une élection libre et équitable", a insisté Buhari.

Des médias locaux font état d'une participation faible et parfois nulle dans les Etats d'Enugu et d'Anambra (sud-est), où des habitants ont dit avoir été privés du droit de vote.

Dans l'Etat de Kano (nord), des groupes armés de fusils et de coutelas ont dérobé des urnes et emporté du matériel électoral. Dans celui d'Ondo (sud-ouest), des malfaiteurs en uniformes de la police et de l'armée ont enlevé un responsable électoral. Dans l'Etat de Bayelsa (sud), l'envoyée spéciale de Reuters a assisté à des bourrages d'urnes par des représentants de la commission électorale.

CAMION-CITERNE PIEGE

Quelques heures avant l'ouverture des bureaux de vote, des inconnus avaient tenté de faire sauter le siège de la commission électorale à Abuja, la capitale fédérale, au moyen d'un camion-citerne entièrement rempli d'essence. Le véhicule a heurté un poteau téléphonique devant le bâtiment sans exploser.

Vendredi soir, des activistes avaient attaqué les bureaux du candidat du parti au pouvoir à la vice-présidence dans le Sud pétrolifère. La police a parlé d'une tentative d'assassinat. Le candidat en est sorti indemne, mais deux civils ont été tués.

Le commissaire électoral Maurice Iwu a dénoncé des actes de "Nigérians désespérés" prêts à saboter le processus démocratique, mais en ajoutant que le scrutin devait continuer.

Le président sortant, Olusegun Obasanjo, qui ne pouvait briguer un troisième mandat, a démenti toute fraude orchestrée. "Notre gouvernement n'a aucune raison de fausser les résultats des élections", a-t-il dit.

L'opposition, qui qualifie le candidat du PDP de marionnette d'Obasanjo, a retiré sa confiance aux autorités électorales après les régionales, remportées haut la main par le PDP mais là aussi marquées par des violences et des accusations de fraude.

Plus de 60 millions de bulletins de vote ont dû être réimprimés au dernier moment, la Cour suprême ayant estimé que la commission électorale avait agi illégalement en disqualifiant le vice-président Atiku Abubakar - grand rival d'Obasanjo.

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