Famine : des millions de personnes menacées
L'ONU demande l'octroi d'une aide d'urgence à l'Afrique australe
Par Michael Fleshman
Deux ans de sécheresse, qui s'ajoutent à une pauvreté générale, à des perturbations de la production et à l'épuisement des réserves alimentaires, ont plongé l'Afrique australe dans la crise alimentaire la plus grave qu'elle ait connue depuis au moins 10 ans. La famine menace près de 16 millions de personnes de sept pays d'ici la fin de l'année. Si des mesures d'urgence ne sont pas prises, prévient l'Organisation mondiale de la santé (OMS), la malnutrition et les maladies pourraient faire 50 000 morts par mois. Début juillet, l'ONU a lancé un appel d'urgence pour obtenir 611 millions de dollars afin de lutter contre la crise régionale, après avoir précédemment demandé 236 millions de dollars pour aider l'Angola.
L'aide alimentaire arrive au Malawi, mais la région en recevra-t-elle suffisamment pour éviter de nombreux autres décès ?
Photo : ©PAM / Mike Higgins
Pour certains, il est déjà trop tard. Le mari de Madyawako Lepu est l'un des 70 membres de la communauté de Gwenge, dans le centre du Malawi, à être morts de faim cette année. "Il n'y avait rien à manger", a expliqué Mme Lepu au Programme alimentaire mondial (PAM). "En désespoir de cause, nous avons commencé à manger les racines de bananes et d'autres plantes sauvages. Mais ça n'a pas suffi à sauver mon mari." Comme Mme Lepu et les 12 personnes à sa charge, quelque 3,2 millions de Malawiens espèrent qu'une aide alimentaire d'urgence arrivera dans les prochains mois. Mais cette aide pourrait ne jamais se concrétiser. Début août, l'ONU a annoncé avoir recueilli à peine 22 % des 144,3 millions de dollars nécessaires au financement des secours d'urgence dans ce pays.
La sécheresse en Afrique australe
Source : ONU Afrique Relance, d'après des données du Bureau de la coordination des affaires humanitaires de l'ONU, du Programme alimentaire mondial et de l'Agency for International development des Etats-Unis.
Mme Lepu fait partie des dizaines de millions d'habitants de 21 pays d'Afrique subsaharienne confrontés à de graves pénuries alimentaires cette année, d'après l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO). Ce phénomène s'explique, entre autres, par des précipitations insuffisantes, des conflits civils et inter-étatiques et la pauvreté endémique. Les réserves alimentaires de la majorité des régions de l'Afrique australe, centrale et orientale, et de la région du fleuve Mano en Afrique de l'Ouest ont considérablement diminué. La pénurie de vivres a ensuite provoqué une flambée des prix des articles de première nécessité, maintenant hors de la portée des populations pauvres.
Un Zimbabwéen sur deux est menacé
Mais c'est en Afrique australe que la sécheresse est la plus cruelle, et le Zimbabwe est l'un des pays les plus durement touchés. Bien qu'exportateur de produits alimentaires dans les années fastes, le Zimbabwe prévoit que sa prochaine récolte de maïs n'atteindra que 23 % du niveau de 1999-2000. Plus de six millions de personnes, soit près de la moitié de la population, devraient solliciter une aide alimentaire d'ici la fin de l'année. Très souvent critiqué, le plan du gouvernement prévoyant de redistribuer aux Africains sans terres des exploitations agricoles appartenant aux Blancs a contribué à cette pénurie, mais la FAO estime que les précipitations trop faibles de janvier à mars, en période de végétation, en sont la cause principale.
En Angola, paradoxalement, c'est la fin du conflit de plusieurs dizaines d'années qui a provoqué une hausse de la demande d'aide alimentaire. Des centaines de milliers de personnes auparavant isolées ont pu aller demander de l'aide dans les villes et les centres de démobilisation. Au début de l'année, l'ONU fournissait des vivres à un million d'Angolais. Leur nombre devrait passer à 1,5 million d'ici la fin de l'année, mettant à rude épreuve les programmes de secours existants.
Le Secrétaire général, Kofi Annan, a nommé en juillet le Directeur du PAM, James Morris, au poste d'envoyé spécial pour la crise humanitaire en Afrique australe, témoignant ainsi de la gravité de la situation. M. Morris est chargé d'attirer l'attention de la communauté internationale sur l'aggravation de la crise. "Avec votre soutien, nous sauverons des vies", a dit M. Annan aux donateurs.
Les Grands Lacs et la corne de l'Afrique
D'autres régions du continent auront également besoin d'aide. Dans les Grands Lacs, malgré les précipitations et les récoltes abondantes de l'an dernier, un million de réfugiés et trois millions de personnes déplacées sont à la merci de la famine. Dans la corne de l'Afrique, la sécheresse exceptionnelle de l'Ethiopie a fait passer de deux à quatre millions le nombre de personnes ayant besoin d'une aide d'urgence ; 2,5 millions de personnes risquent de connaître le même sort. En Erythrée, malgré la récolte abondante de l'an dernier, environ 1,3 million de personnes, dont beaucoup ont été déplacées à la suite du conflit avec l'Ethiopie, dépendent toujours de l'aide alimentaire extérieure. La persistance de la sécheresse dans certaines régions n'a fait que réduire davantage la sécurité alimentaire.
Les engagements des donateurs ne sont pas adaptés aux besoins de plus en plus importants et les organismes des Nations Unies essaient désespérément de trouver de nouvelles ressources. Le PAM a dû emprunter 20 millions de dollars auprès du Bureau de la coordination des affaires humanitaires de l'ONU pour assurer la continuité de l'aide alimentaire en Afrique australe. Mais le temps presse. D'après l'OMS, si elles n'ont pas immédiatement accès à des vivres, des soins médicaux, de l'eau potable et des graines à planter, les victimes de la sécheresse en Afrique risquent de subir "d'énormes pertes en vies humaines".
Par Michael Fleshman
Deux ans de sécheresse, qui s'ajoutent à une pauvreté générale, à des perturbations de la production et à l'épuisement des réserves alimentaires, ont plongé l'Afrique australe dans la crise alimentaire la plus grave qu'elle ait connue depuis au moins 10 ans. La famine menace près de 16 millions de personnes de sept pays d'ici la fin de l'année. Si des mesures d'urgence ne sont pas prises, prévient l'Organisation mondiale de la santé (OMS), la malnutrition et les maladies pourraient faire 50 000 morts par mois. Début juillet, l'ONU a lancé un appel d'urgence pour obtenir 611 millions de dollars afin de lutter contre la crise régionale, après avoir précédemment demandé 236 millions de dollars pour aider l'Angola.
L'aide alimentaire arrive au Malawi, mais la région en recevra-t-elle suffisamment pour éviter de nombreux autres décès ?
Photo : ©PAM / Mike Higgins
Pour certains, il est déjà trop tard. Le mari de Madyawako Lepu est l'un des 70 membres de la communauté de Gwenge, dans le centre du Malawi, à être morts de faim cette année. "Il n'y avait rien à manger", a expliqué Mme Lepu au Programme alimentaire mondial (PAM). "En désespoir de cause, nous avons commencé à manger les racines de bananes et d'autres plantes sauvages. Mais ça n'a pas suffi à sauver mon mari." Comme Mme Lepu et les 12 personnes à sa charge, quelque 3,2 millions de Malawiens espèrent qu'une aide alimentaire d'urgence arrivera dans les prochains mois. Mais cette aide pourrait ne jamais se concrétiser. Début août, l'ONU a annoncé avoir recueilli à peine 22 % des 144,3 millions de dollars nécessaires au financement des secours d'urgence dans ce pays.
La sécheresse en Afrique australe
Source : ONU Afrique Relance, d'après des données du Bureau de la coordination des affaires humanitaires de l'ONU, du Programme alimentaire mondial et de l'Agency for International development des Etats-Unis.
Mme Lepu fait partie des dizaines de millions d'habitants de 21 pays d'Afrique subsaharienne confrontés à de graves pénuries alimentaires cette année, d'après l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO). Ce phénomène s'explique, entre autres, par des précipitations insuffisantes, des conflits civils et inter-étatiques et la pauvreté endémique. Les réserves alimentaires de la majorité des régions de l'Afrique australe, centrale et orientale, et de la région du fleuve Mano en Afrique de l'Ouest ont considérablement diminué. La pénurie de vivres a ensuite provoqué une flambée des prix des articles de première nécessité, maintenant hors de la portée des populations pauvres.
Un Zimbabwéen sur deux est menacé
Mais c'est en Afrique australe que la sécheresse est la plus cruelle, et le Zimbabwe est l'un des pays les plus durement touchés. Bien qu'exportateur de produits alimentaires dans les années fastes, le Zimbabwe prévoit que sa prochaine récolte de maïs n'atteindra que 23 % du niveau de 1999-2000. Plus de six millions de personnes, soit près de la moitié de la population, devraient solliciter une aide alimentaire d'ici la fin de l'année. Très souvent critiqué, le plan du gouvernement prévoyant de redistribuer aux Africains sans terres des exploitations agricoles appartenant aux Blancs a contribué à cette pénurie, mais la FAO estime que les précipitations trop faibles de janvier à mars, en période de végétation, en sont la cause principale.
En Angola, paradoxalement, c'est la fin du conflit de plusieurs dizaines d'années qui a provoqué une hausse de la demande d'aide alimentaire. Des centaines de milliers de personnes auparavant isolées ont pu aller demander de l'aide dans les villes et les centres de démobilisation. Au début de l'année, l'ONU fournissait des vivres à un million d'Angolais. Leur nombre devrait passer à 1,5 million d'ici la fin de l'année, mettant à rude épreuve les programmes de secours existants.
Le Secrétaire général, Kofi Annan, a nommé en juillet le Directeur du PAM, James Morris, au poste d'envoyé spécial pour la crise humanitaire en Afrique australe, témoignant ainsi de la gravité de la situation. M. Morris est chargé d'attirer l'attention de la communauté internationale sur l'aggravation de la crise. "Avec votre soutien, nous sauverons des vies", a dit M. Annan aux donateurs.
Les Grands Lacs et la corne de l'Afrique
D'autres régions du continent auront également besoin d'aide. Dans les Grands Lacs, malgré les précipitations et les récoltes abondantes de l'an dernier, un million de réfugiés et trois millions de personnes déplacées sont à la merci de la famine. Dans la corne de l'Afrique, la sécheresse exceptionnelle de l'Ethiopie a fait passer de deux à quatre millions le nombre de personnes ayant besoin d'une aide d'urgence ; 2,5 millions de personnes risquent de connaître le même sort. En Erythrée, malgré la récolte abondante de l'an dernier, environ 1,3 million de personnes, dont beaucoup ont été déplacées à la suite du conflit avec l'Ethiopie, dépendent toujours de l'aide alimentaire extérieure. La persistance de la sécheresse dans certaines régions n'a fait que réduire davantage la sécurité alimentaire.
Les engagements des donateurs ne sont pas adaptés aux besoins de plus en plus importants et les organismes des Nations Unies essaient désespérément de trouver de nouvelles ressources. Le PAM a dû emprunter 20 millions de dollars auprès du Bureau de la coordination des affaires humanitaires de l'ONU pour assurer la continuité de l'aide alimentaire en Afrique australe. Mais le temps presse. D'après l'OMS, si elles n'ont pas immédiatement accès à des vivres, des soins médicaux, de l'eau potable et des graines à planter, les victimes de la sécheresse en Afrique risquent de subir "d'énormes pertes en vies humaines".
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