dimanche 1 avril 2007

Tous avec les Anglais!

Face à la détention par l'Iran des quinze marins britanniques, la solidarité européenne à l'égard de Londres doit être sans faille. Le sort réservé à ces otages, exhibés à la télévision et contraints de se livrer à des excuses publiques, est odieux et inacceptable. Leur libération doit être obtenue le plus tôt possible.
Cela dit, ne soyons pas naïfs. Si Téhéran, ou plutôt certains responsables iraniens ont recours à une manoeuvre aussi méprisable, c'est parce qu'ils connaissent les ressorts de l'opinion en Occident, qu'ils ont une longue expérience de ce genre de situation et qu'ils espèrent, une fois de plus, tirer profit de l'indignation légitime qu'ils suscitent.
Les marins britanniques sont entre les mains des gardiens de la révolution, les pasdarans, le secteur le plus dur du régime d'où est issu le président Ahmanidejad. Avec cette prise de guerre, les gardiens de la révolution disposent d'un atout inespéré dans la partie complexe qui se joue entre les différents centres de pouvoir de la République islamique.
Que les marins aient été pris dans les eaux irakiennes ou iraniennes, l'avertissement est clair : les pasdarans veillent à la défense de la souveraineté nationale dans le secteur. Voilà de quoi renforcer le camp des ultras à Téhéran, au moment où l'autorité du président Ahmanidejad est remise en cause.
Sur le plan extérieur, les gardiens de la révolution viennent de subir une succession d'affronts qu'ils ont hâte de laver. Il y a eu d'abord la capture, en Irak, de cinq des leurs par l'armée américaine. Les cinq « diplomates » iraniens sont toujours en captivité. Il y a eu, ensuite, la défection en Turquie de l'ancien général des gardiens de la révolution, Ali Reza Asghari.
Il y a eu, enfin, dans les heures qui ont suivi la capture des marins, samedi dernier, l'adoption unanime par le Conseil de sécurité de l'ONU de la résolution 1747 qui alourdit les sanctions liées au dossier nucléaire et qui cible intérêts et individus liés aux pasdarans.
Il ne serait pas étonnant que ceux-ci recherchent l'escalade afin de mobiliser derrière eux un appareil d'État qui commence à flancher face à une pression extérieure de plus en plus forte.
La crise suscitée par la capture des marins britanniques, pour dramatique qu'elle soit, serait le signe que les sanctions produisent l'effet désiré : exacerber les contradictions au sein d'un régime en bout de course.
Dans ces conditions, il ne faudrait pas tomber dans le piège de la provocation des pasdarans en imposant à l'Iran des sanctions généralisées. Les Britanniques ne s'y sont pas trompés et gèrent la crise avec la maîtrise qui les caractérise. Le « gel » de leurs relations diplomatiques avec Téhéran est une réponse mesurée, eu égard à l'affront subi. Il n'y a eu ni rappel de l'ambassadeur anglais ni gel d'avoirs ou rupture des liens commerciaux.
Des deux protagonistes, on voit bien lequel contrôle la situation. Le sang-froid de nos amis anglais mérite un soutien absolu et la voie des sanctions graduelles doit être suivie scrupuleusement.


L'éditorial de Pierre Rousselin.
Publié le 31 mars 2007 Le Figaro

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