ONG et Afrique; mariage de raison ?
Les ONG qui demandent une gestion transparente et équitable des revenus pétroliers et miniers tissent leur toile sur le continent africain. Elles viennent de se réunir au Cameroun, elles ont fait les comptes : de quatre en 2005, le nombre de coalitions membres de «Publiez ce que vous payez» (PCQVP) est passé à douze. D'autres sont en cours de constitution.
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Pression. «Notre mobilisation a commencé en 2000, raconte Jean-Pierre Muteba Luhunga, syndicaliste en république démocratique du Congo. La Gécamines, l'entreprise minière d'Etat, bradait ses gisements à des étrangers. Dans le même temps elle n'avait pas de quoi payer ses travailleurs.» La pression a payé et les contrats miniers vont être revus par le gouvernement nouvellement élu. Mais ça ne plaît pas forcément: victime de plusieurs tentatives d'empoisonnement, Jean-Pierre Muteba Luhunga s'est vu aussi refuser deux fois un visa pour se rendre à Bruxelles. Si la société civile s'affirme, les résistances des autorités et des entreprises restent fortes (lire ci-contre).
Pas question pourtant de reculer. «Ce n'est pas parce que nous ne nous sentons pas en sécurité que nous allons nous arrêter, assure le Congolais Samuel Nsikabaka (fondation Niosi). Ce qui se passe est scandaleux : le pays est riche en pétrole, mais la situation économique ne fait que se dégrader.» Les élections législatives de juin au Congo seront l'occasion d'interpeller les candidats. «Nous n'allons pas nous contenter de demander à l'Etat de publier ce qu'il perçoit des sociétés pétrolières. Nous voulons aussi qu'il dise comment il le dépense», prévient Nsikabaka.
Même au Ghana, «pays modèle» de gestion équitable des ressources minières, les réseaux restent vigilants : «La transparence ne doit pas faire oublier le reste : la question des impacts environnementaux et sociaux de l'exploitation minière, explique Steve Emmanuel Manteaw (Integrated Social Development Centre). Dès qu'il le faut, nous saisissons la justice.»
La mobilisation semble irréversible. «Au Gabon, nous dénonçons la persistance des clauses de confidentialité dans les contrats. Mais que valent les dénonciations si les autorités ne réagissent pas ? L'opinion internationale et les institutions financières, dont le Gabon dépend, restent le seul moyen de pression», note Marc Ona (Brainforest). Cela ne marche pas toujours.
«Dans la durée». La preuve au Tchad : contre l'avis de la Banque mondiale, le gouvernement a révisé la loi de gestion, censée être équitable, des revenus pétroliers. «Mais ce régime n'est pas éternel, et notre action s'inscrit dans la durée», assure Gilbert Maounonodji (Groupe de recherches alternatives et de monitoring du projet pétrole Tchad-Cameroun). Rimtebaye Nassingar (Commission nationale Justice et Paix) ajoute : «On mène une étude sur l'utilisation des revenus pétroliers à l'issue de laquelle nous porterons plainte contre ceux qui les ont détournés.» . Au cours des mois à venir, les coalitions Publiez ce que vous payez tenteront de convaincre l'Union africaine et la Banque africaine de développement (BAD) de défendre elles aussi le principe de transparence.
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Libellés : Banque mondiale, ONG
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